Michèle ADDALA

« Partager une intelligence collective. »

Comédienne formée aux Conservatoires d’Avignon, d’Amiens, et à l’IFCA d’Aix-en-Provence, elle fonde en 1985 la Cie Mises en Scène dont elle est la directrice artistique. Entourée d’un collectif de professionnels, elle mène avec constance, contre vents et marées, des expériences artistiques pluridisciplinaires en lien avec le territoire et ses habitants. Son esthétique frotte des écritures fictionnelles et des paroles du réel, joue de la transparence entre l’acteur et le personnage, puise dans l’écriture du plateau.

Entretien : « ON A BESOIN D’ESPACES DE RÊVERIE ET DE PARTAGER UNE INTELLIGENCE COLLECTIVE. »

 

Vous avez présenté lors de la Nuit européenne des musées en mai 2022 une première forme de « La Maison Bouge » au Musée Vouland.
Quel est ce nouveau projet ?

Il est issu d’un Parcours de création partagée mêlant amateurs et professionnels autour de la question du dedans/dehors, en miroir avec celle du patrimoine comme bien commun. Au cœur de cet intrigant musée des Arts décoratifs, que nous avons pu revisiter durant quelques jours grâce à l’accueil généreux de sa directrice Odile Guichard et de son équipe, nous avons commencé à improviser autour du texte « Home Movie » de Suzanne Joubert, qui parle avant tout de nos enfermements et du racisme ordinaire. Séduite par l’acuité et la résonance du propos de l’auteure dans nos vies quotidiennes, par le miroir qu’elle nous tend, j’ai eu envie de poursuivre l’exploration et de continuer à agiter ces questions sociétales, à inviter chacun, habitants, artistes, institutions et lieux muséaux à faire « bouger la maison ». Pour cette nouvelle création au long cours, nous souhaitons faire surgir l’universalité émanant de lieux du patrimoine, en extraire leur essence sensible et la partager avec tous dans des allers-retours qui s’entrelacent avec poésie.

La programmation du Festival OFF  organisé chaque été à L’Entrepôt est-elle proche de la démarche que vous menez à l’année avec la Cie Mises en Scène ?

Nous avons envie, et ce pour les années à venir, de colorer un peu plus encore le Festival autour de notre démarche, à savoir questionner le monde, en accueillant des projets qui aient la particularité de frayer dans la vie, en agitant des interrogations poétiques et politiques. Il s’agit de théâtre contemporain et de compagnies qui, comme nous, parient sur l’interdisciplinarité, sur le métissage des disciplines et des formes d’écriture, avec l’envie d’interpeller, de débattre. Car l’après-spectacle, pour nous et pour d’autres compagnies qui le souhaitent aussi, est très important dans la rencontre avec les spectateurs. C’est vrai que  la rencontre humaine est essentielle dans les projets de Mises en Scène et pour les compagnies qu’on accueille, à travers des projets d’action culturelle mais aussi au cœur des projets de création.

Ce lien avec les habitants, les spectateurs, aide à dessiner la programmation autant qu’il définit votre travail ?

Oui, c’est une ligne qu’on voudrait affirmer plus encore. On a travaillé au départ sur la question du théâtre et des témoignages, puis on a volontairement élargi. Comme nous, certaines compagnies travaillent avec la matière du réel qui vient colorer des fictions et des écritures d’auteur.

Vous souhaitez ancrer ces questionnements à l’Entrepôt. Que s’y passe-t-il à l’année ?

Nous menons un travail constant de créations partagées avec les amateurs, sur des processus longs, très engageants, engagés. Nous sommes partis sur deux années de travail qui agitent la question du « dehors », en nouant des liens partenariaux avec des espaces peu familiers. Nous avons eu cette idée de créer du lien avec les musées, les établissements patrimoniaux de la ville, les bibliothèques, la maison Jean Vilar, les Archives municipales, le Musée Vouland… L’Entrepôt est très occupé : il y a sept parcours de création partagée avec des enfants, des ados, des adultes, artistes et amateurs. Un autre axe privilégié est celui de la résidence : on accueille nos artistes associés sur des projets de création et on va à la recherche de compagnies dans des sensibilités proches de la nôtre, qui peuvent alimenter notre propre recherche aussi.

À travers l’identité de l’Entrepôt en général, et de sa programmation estivale, Mises en Scène pourrait initier un réseau d’expressions singulières communes, proches du réel ?

Ça paraît assez logique que lors du Festival, l’Entrepôt affirme une identité forte, une programmation de plus en plus aiguisée à l’endroit d’une recherche théâtrale qui croise des préoccupations artistiques, sociétales et politiques. On est relativement nombreux à travailler sur ces terrains-là, mais on ne se connaît pas ou peu. Ce sont des spectacles tellement peu lisses, si particuliers, ils ont du mal parfois à trouver leur place dans des programmations plus classiques. Ils sont un peu « hors normes » dans le sens ou ce n’est pas forcément une « écriture d’auteur » mais plutôt une « écriture fragmentée » qui déjoue la possibilité d’une mise en scène classique. L’Entrepôt pourrait devenir le lieu de ces expressions… Ça permettrait en effet de créer un réseau qui puisse trouver sa place dans la programmation du OFF en alimentant également la vie de la Compagnie et celle de nos territoires.

La Compagnie Mises en Scène a 40 ans, quel bilan en tant que fondatrice ?

Quelle drôle d’histoire ! C’est quand je regarde derrière que je me rends compte du chemin parcouru. 40 ans ! Ça paraît absolument énorme, ce n’est pas facile de faire vivre un tel projet aussi longtemps, en essayant de continuer à tenir l’exigence, la singularité, les enjeux. Il y a des moments difficiles quand on est directrice d’un projet comme le nôtre. C’est difficilement repérable aussi pour des partenaires. Ce qui me reste malgré tout, parce que je suis optimiste par nature, ce sont toutes les folles aventures artistiques et les rencontres humaines. Je suis émue par les gens, j’aime les gens. Mises en Scène c’est vraiment un projet qui fédère, avec des personnes très différentes et ça c’est plaisant, parce qu’il n’y a pas beaucoup d’espaces où on peut retrouver cette diversité-là je crois…

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